Figure A: Le Baiser, grès, 1907–1908 : – vue de front : 26 × 14 × 10 cm

Figure B. Le Baiser, pierre de Marne, 1907 ; dimensions : 28,0 x 25,0 x 21,5 cm ; signé « Brancusi » à la base, non daté Musée d’Art Craiova

Figure A-1: Le Baiser en grès – vue de haut : 26 × 14 × 10 cm

Figure A-2: Le Baiser en grès – signature dans la pierre

Du point de vue de la hauteur et par quelques éléments stylistiques, cette pièce s’approche du Baiser de la Figure B. Les proportions lui confèrent de la souplesse, et la longueur et l’arrangement des cheveux(Figures A-1) sont ressemblants, en observant que leur forme est droite et non pas ondoyante, tandis que les figures sont complètement découvertes.

Le contour des yeux est enfoncé dans la pierre, de même que les lèvres unies. Les bras minces et ronds sont enroulés autour du bloc en pierre dans lequel sont taillés les bustes des amoureux, sans les dépasser, car vu du haut le Baiser semble un parallélépipède rectangulaire presque parfait (Figure A).

Les mains sont fines, s’achevant avec des doigts grêles. On remarque cette fois que l’homme est plus haut que la femme, ce qui est aussi difficilement à voir que sur le Baiser de 1907. Une autre différence est l’aspect pointu des seins de la femme qui « piquent » la poitrine de l’homme. Les yeux et les lèvres vus de profil sont rendus sous la forme de deux triangles unis à la base, et cette union forme un rhombe.

Les seins de la femme sont configurés par des angles aigus de la ligne de démarcation du buste de l’homme et de celui de la femme. Ces éléments d’origine cubiste nous aident à attribuer la sculpture à la période 1907–1908, car l’artiste ne l’a pas datée. Le Baiser de grès est signé avec des lettres calligraphiques par inscription (incision) dans la partie inférieure du côté gauche : C. Br. (Figure A-2).

Conclusions

La série des sculptures en pierre sur le thème du Baiser de Brancusi comprend neuf pièces en ronde-bosse, exécutées en calcaire gris ou jaune, se trouvant à présent dans des musées et collections privées en Roumanie, en France et aux États-Unis.

Le Baiser de 1907 a ouvert cette série, considérée comme la première œuvre de sculpture moderne exécutée sans esquisses ni mesurages préalables, en fait une déclaration d’indépendance envers Auguste Rodin, dans l’atelier duquel il avait travaillé en tant que praticien un peu plus d’un mois et dont il voulait échapper à l’influence pour trouver sa propre route artistique.

Dans la création de Brancusi, les sculptures en pierre, bois, argile ou marbre, à peu d’exceptions, ont été un intermède pour la version en bronze. On peut remarquer que le Baiser, dans les variantes connues jusqu’à présent, a été fait en pierre ; ensuite, il a réalisé des moulages en gypse pour certaines versions, mais il ne les a pas coulés en métal.

La découverte d’une nouvelle sculpture du Baiser, qui enrichit le patrimoine mondial, nous réjouit, car elle nous présente un artiste préoccupé à approfondir un thème tant artistique que philosophique, sans s’éloigner de son but en art : rendre l’essence des choses.

Le Baiser inconnu, trouvé dans une collection particulière et analysé dans cette étude, complète la série des sculptures sur ce thème exécutées par Brancusi pendant presque cinquante ans. La sculpture occupe une place spéciale par la nature du matériel dont elle est faite – le grès – qui n’avait jamais été utilisé dans d’autres sculptures, probablement en raison de sa dureté particulière (6,5–7 sur l’échelle de Mohs), supérieure à celle du calcaire ou du marbre (3–4 sur l’échelle de Mohs).

De même, le rapport des dimensions est différent, conférant de la souplesse et de l’élégance à l’œuvre. Les éléments stylistiques d’influence cubiste rendent la pièce intéressante et la placent tout près du Baiser réalisé en 1907.

Pourquoi Brancusi a-t-il choisi d’exécuter le monument de l’amour par le buste et non pas par le corps entier ? Même dans le cas de la stèle funéraire et de la borne frontière, c’est toujours le buste qui se trouve au premier plan, les pieds suggérant le reste du corps.

L’artiste a choisi le buste parce qu’ici se trouvent les organes ayant un rôle dans l’amour : le cœur, symbole de l’amour pur ; les yeux, miroir de l’âme, par lesquels la lumière pénètre à l’intérieur et s’éparpille à l’extérieur ; les lèvres, canal de liaison échangeant des énergies limpides ; mais aussi les bras, qui tiennent les corps étroitement serrés pour l’éternité, les faisant paraître un seul être.

Brancusi a sculpté des amoureux sans âge et sans aucun élément d’attraction physique, bien au contraire, car l’amour est vécu à l’intérieur, dans la partie invisible, et non à l’extérieur. Il est exaltant, donc n’ayant besoin d’aucune connexion à la terre par un support.

Sur la signification du Baiser, Brancusi avait l’habitude de dire :

" J’ai eu l’intention de rappeler (par la sculpture Le Baiser) non seulement ce couple unique d’amoureux, mais aussi tous les autres couples (anonymes) qui se sont jamais aimés dans ce monde – avant de le quitter... Chacune de mes sculptures a été motivée (à l’origine) d’un sentiment très profond. "

----------------------------------------------------------------------------

----------------------------------------------------------------------------

----------------------------------------------------------------------------

Articles associés